Négociation et geste commercial
#1
Pour une fois, nous n'allons pas directement parler de technique de gestion de la relation commerciale mais plutôt de technique de «vente» (même si je n'aime pas utiliser cette expression que je raccroche toujours au commercial pied dans la porte des années 80) et de relation commerciale au sens «physique» du terme. Enfin, plus précisément, du moment de la relation commerciale où vous décidez de faire un geste commercial.

Dans la plupart des démarches commerciales, il y a un moment pour la négociation. Bien entendu, ce n'est pas le cas quand vous vendez une pub sur Internet, des piles pour des réveils ou des bougies.

Mais s'il existe des cas où il n'y a pas de négociation, il n'existe quasiment pas de type de relation commerciale où un geste commercial peut apparaître.

Cela peut être une réduction, un avoir, un cadeau, etc. Mais dans tous les domaines, on peut être amené à pratiquer un geste commercial. Mais il y a plusieurs règles pour définir un geste commercial. Parce que se contenter de dire à son futur client : «bon, je vous ai fait une remise de 10 000 €, vous vous rendez compte», ce n'est pas cela qui va faire avancer les choses.

Commençons par voir ce que peut être votre geste commercial. On pense souvent en effet qu'un geste commercial c'est une remise sur une facture. «Voilà, je vous ai fait 20 % de remise». Mais ce n'est pas forcément cela. Cela peut être aussi d'autre prestations offertes. Par exemple si vous vendez des meubles vous pouvez effectivement faire une remise sur le prix d'un meuble. Mais vous pouvez aussi offrir la location de la camionnette de livraison. Si vous faites du développement informatique, vous pouvez offrir 10 % sur votre prix journée. Mais vous pouvez aussi choisir d'offrir plutôt une journée de prestation en plus ou une journée de formation.

Ici vous allez me dire que je remplis pour le plaisir de remplir. Parce qu'il n'y a pas de différence entre faire 10 % de réduction sur 10 jours de travail ou en offrir un onzième. Mais en fait si, il y en a une. Le CA que vous faîtes. Si vous facturez 10 jours plein et que vous offrez un jour, vous aurez facturé 10 jours plein de CA pour 11 jours de travail. Disons que votre tarif jour/homme est de 800 €, vous avez donc facturé 8 000 € et travaillé 11 jours. Si vous facturez 10 jours à 10 %, vous aurez donc facturé 90 % de 10 jours plein de CA et vous aurez bosser 10 jours. Toujours avec un tarif de 800 euros , vous avez facturé 7 200 € et travaillé 10 jours.

Et là,  une simple question, qu'est-ce qui vous manque le plus ? Du CA ou des jours hommes disponibles ? Effectivement si vos équipes sont pleins à 100 % tout le temps, que vous êtes obligés de refuser des contrats tellement vous avez de boulot, alors peut-être qu'il vaut mieux facturer 10 jours avec une remise de 10 %. Mais ce n'est pas souvent le cas à priori...

Passons maintenant à la manière de définir votre geste commercial. Cela passe par un certain nombre de caractéristiques  [ceux qui connaissent reconnaîtront une sous-partie de la définition SMART, dont nous parlerons dans un prochain billet] :
  • Il doit être mesurable. C'est à dire que votre devis doit présenter le montant avant et après geste commercial. Si vous avez un devis en plusieurs lignes et que vous faites un geste commercial, il faut que l'impact soit visible ligne par ligne.
  • Il doit être pertinent. C'est à dire qu'il doit être utile à votre prospect. Ne lui offrez pas quelque chose qu'il sait lui être inutile (sinon il pourrait être tenté de croire que vous essayez de le pigeonner là).
  • Il doit être temporellement défini. Ce critère n'est pas applicable partout. Mais si vous faites de la facturation récurrente, si vous offrez 3 mois, écrivez le noir sur blanc «3 mois offerts». Si vous mettez en place une réduction, écrivez le en plus gros encore «3 premiers mois 25 % moins cher». Sinon le 4ème mois vous allez avoir droit à une flopée d'appels mécontents demandant pourquoi vous avez augmenté vos tarifs sans prévenir.
  • Il doit être acceptable. En ce sens que votre prospect ne doit pas avoir l'impression que s'il avait accepté votre devis, il se serait fait pigeonné [une petite anecdote ici : un de mes amis travaille dans une société qui un jour cherchait des fournisseurs. Ils font un cahier des charges, reçoivent des prestataires, puis des offres. Une offre semble intéressante mais est beaucoup trop chère. Discussion avec le prestataire qui du coup, propose de diviser le prix par deux, là comme ça. Le dossier de ces prestataires a été immédiatement disqualifié. La société de mon ami ayant eu l'impression (à priori à raison) d'avoir été prise pour des imbéciles].

Mais ce n'est pas tout. Un geste commercial ne devrait jamais être «gratuit». Il doit être impactant pour votre prospect. Vous facturez 10 jours et en offrez 3 ? Alors demandez 33 % et non pas 25 % d'acompte à la commande. Et là encore précisez le en toutes lettres. Et ne précisez pas juste le changement de clause, mais bien que c'est dû au geste commercial.

Vous facturez 15 jours dont 7 avec 30 % de remise ? Rajoutez une clause concernant l'implication demandée à votre prospect dans la rédaction de la définition du besoin/des fonctionnalités et sur le fait que certains points précis seront limités à… et listez les bornes que vous mettez.

Etc.

Il faut responsabiliser vos prospects. Faire un geste commercial ce n'est pas gratuit pour vous, cela va vous coûter, il faut donc qu'en face votre prospect fasse aussi preuve de bonne volonté.

Enfin, et cela terminera mon billet du jour, n'en voulez pas à votre prospect d'avoir accepté votre geste commercial. Pour une raison ou une autre vous avez à un moment fait un geste commercial. Et il a été accepté. C'était peut être un geste commercial vraiment très important. Et là maintenant, quelques semaines après, cela vous met dans une situation que vous n'appréciez pas. Vous devez bosser beaucoup pour peu, vous devez refuser un contrat bien mieux payé ou autre. Mais votre prospect maintenant client n'y est pour rien lui. Il ne vous a pas forcé la main pour que vous lui fassiez un tel geste. Et donc il s'attend à avoir une prestation aussi bonne qu'à plein tarif. C'est normal. Dans une telle situation, si vous voulez râler sur quelqu'un, râler sur vous-même.

C'est pour cela que les gestes commerciaux sont des armes à double tranchant. Effectivement ils peuvent vous aider à remporter des contrats, mais si vous les pensez trop à court terme alors qu'ils s'appliquent sur des prestations longues, ils peuvent au final faire bien plus de mal que de bien.
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